carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘmeComme la prĂ©cĂ©dante carte de la semaine n'a pas fait fureur, je vous propose d'analyser durant cette semaine du 7 au 14 dĂ©cembre, le troisiĂšme monstre Synchro Aile Noire Vent d'Argent le SuprĂȘme!Niveau 8 Attaque 2800DĂ©fense 2000BĂȘte AilĂ©e/Synchro/Effet1 Syntoniseur Aile Noire + 2 monstres non-Syntoniseur ou cette carte est invoquĂ©e par Synchronisation, vous pouvez selectionner et dĂ©truire jusqu'Ă deux monstres face recto sur le terrain avec une dĂ©fense infĂ©rieure Ă l'attaque de cette ne pouvez pas mener de Battle Phase durant le tour oĂč vous activez cet prochaine fois qu'un monstre "Aile Noire" que vous contrĂŽlez doit ĂȘtre dĂ©tuit durant le tour de votre adversaire, il n'est pas ne pouvez activer cet effet qu'une fois par toujours, justifier ce que vous Ă vos claviers!DerniĂšre Ă©dition par Maxwell le Sam 12 DĂ©c - 1236, Ă©ditĂ© 1 foisMaxwellAdminMessages 481Date d'inscription 10/07/2009Localisation Devine... Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme InvitĂ© Lun 7 DĂ©c - 014Son premier effet est bof =/MĂȘme si avec 2800 d'Atk on est sĂ»r de dĂ©truire les monstres ciblĂ©s, il faut quand mĂȘme qu'ils soient face visible. A jouer dans des situations particuliĂ©re soit des monstres dĂ©fensif trop puissant Marshmallow, Moissoneur d'esprit, soit un retournement de situation lorsque l'adversaire a l'avantage du nombre en particulier les petit monstres.Dans le deuxiĂ©me cas, sortir une Synchro avec 1 Synto Aile noir + 2 Monstres non-synto me paraĂźt assez dĂ©licat, surtout en partie premiĂ©re effet me araĂźt donc trop alĂ©atoire ^^En revanche, le deuxiĂ©me est meilleur Ă mon sens oĂč ce Synchro peut-ĂȘtre indestrucible une fois par tour adverse hĂ© oui, c'est un Aile 2800 d'Atk peu de monstre peuvent lui tenir tĂȘte, ce qui est trĂ©s niveau me paraĂźt abordable =Conclusion, cette carte me paraĂźt sympa, comme les prĂ©cĂ©dents Synchro Aile abusĂ© au niveau de l'effet, elle est rĂ©servĂ©e casiment Ă un deck Aile Noir. Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Khibou Mer 9 DĂ©c - 2113Ce que je trouve vraiment dommage Ă cette carte c'est d'avoir besoin de 3 synthoniseurs, j'ai du mal a voir comment la jouer efficacement car elle a peu de chance de passer. Avec un vayu mais on perd son effet et c'est dommageenfin ça fait toujours 2800 d'atkKhibouMessages 62Date d'inscription 16/07/2009 Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Maxwell Mer 9 DĂ©c - 2156En citant trois syntoniseurs, je pense que tu as voulu dire un syntoniseurs et deux monstres matĂ©riels synchro?L'important c'est qu'on s'est l'invocation de Vent d'Argent le SuprĂȘme n'est pas possible avec Vayu, car ce syntoniseur ne peut ĂȘtre utilisĂ© qu'avec un autre monstre "Aile Noire", un et un suis aussi tombĂ© dans ce panneau, ne t'en fait 481Date d'inscription 10/07/2009Localisation Devine... Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Khibou Mer 9 DĂ©c - 2230Oui c'est ce que je voulais dire ^^'Sinon si ce que tu dis est vrai ça limite encore plus ce monstrede plus pour se protĂšger lui-mĂȘme maitre des armures est quand mĂȘme mieuxKhibouMessages 62Date d'inscription 16/07/2009 Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Ifrit Jeu 10 DĂ©c - 033exact, ce monstre ne va pas ĂȘtre simple d'utilisation ! mais une fois encore on remarque que les Ailes Noires sont davantage axĂ©s sur la protection que sur l'offensive maĂźtre des armure qui protĂšges les points de vie et maintenant ce monstre qui prĂ©vient d'une destruction une fois par tour. Pour ĂȘtre rĂ©ellement compĂ©titifs il aurait fallu aux Ailes Noirs un monstres Synchro qui puise gĂ©rer les ressources adverses mais qui soit plus simple d' Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Maxwell Sam 12 DĂ©c - 1254Il est temps pour moi de effets de cette carte sont tout simplement formidables!Regardez-moi ça-annulation d'une destruction d'un monstre "Aile Noire" une fois par tour,-destruction de deux monstres sur le terrain ayant moins de 2800 points de dĂ©fense lors de son invocation,-attaque trĂšs Ă©levĂ©e...Bref, qui pourrait ne pas aimer cette carte!Mais bien entendu il y a toujours un inconvĂ©niant avec une carte, celui-ci rĂ©side comme vous l'avez prĂ©cisĂ©, dans le nombre non-syntoniseurs requis1 Syntoniseur "Aile Noire" + 2 monstres non-syntoniseurs ou plus......LĂ franchement ça gĂąche quelques peu l'utilisation de cette carte...Mais honnĂȘtement, j'Ă©prouve une certaine difficultĂ© Ă trouver les bon enchaĂźnement pour placer Aile Noire - Vent D'Argent le quelques exemplesAile Noire - Shura la Flamme Bleue + Aile Noire - Vayu l'Etendard de la Justice + Aile Noire - Kalut, l'Ombre de la Lune ou 1 monstre de niveau 3Dans ce cas, l'effet de Vayu est annulĂ© si vous dĂ©truisez un monstre avec Shura, et Vayu peut servir Ă Synchroniser depuis le Noire - Blizzard, la TempĂȘte d'EtrĂȘme Nord + 1 monstre Aile Noire de niveau 4 + 1 monstre de niveau 2Aile Noire - Blizzard, la TempĂȘte d'EtrĂȘme Nord + 2 Aile Noire - Kalut, l'Ombre de la Lune Bon ici, je fais pas preuve d'originalitĂ©, mais c'est dans l'hypothĂšse ou le joueur utilise un jeu purement Aile mĂȘme ainsi, Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme est extrĂȘmement difficile Ă poser sur le des courses une carte surpuissante, mais presque inutilisable Ă cause du nombre requis pour l'invoquer...PrĂ©fĂ©rez plutĂŽt Aile Noire - MaĂźtre des Armures qui sera et qui a toujours Ă©tĂ© une valeur 481Date d'inscription 10/07/2009Localisation Devine... Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme eyeshield21 Sam 6 FĂ©v - 952carte qui a un bon design une bonne attaque et un bon effet, mais le seul dĂ©faut est sa difficultĂ© a l'invoquer car 2 monstre non synthoniseur+ un synthoniseur en clair tu dois utiliser blizzard ou mistral le bouclier+ 2 monstres aile noires a 3 Ă©toiles, les joueurs de ailes noires prĂ©vĂ©ligiront l'invocation de maitre des armures ou de stardust a la place de vent d'argenteyeshield21Messages 8Date d'inscription 03/02/2010 Re carte n°12 Aile Noire - Vent d'Argent le SuprĂȘme Kaedetsuka Jeu 18 FĂ©v - 1252alors voila j'ai trouver la soluction pour son invocation, de meme pour Archdemon squelette zombie,je construit en ce moment un deck Blackwings Revival composer de zombie et de aile noire,Voici comment on procede,mon terrain, sur le terrain mistral le tourbillon, dans ma main sirocco utilisant sont effet pour invoc normal sans sacrifice, dĂ©voreur de niveau au cimetiĂšre on utilise sont effet sur sirroco qui passe au niveau 4 invoc spĂ© de dĂ©voreur de niveau , mistral niveau 3, dĂ©voreur de niveau niveau 1, sirocco niveau 4 ça fait 8, invoc synchro de Aile Noire - Vent D'Argent le voila le travaille KaedetsukaMessages 173Date d'inscription 18/07/2009 Sujets similairesPermission de ce forumVous ne pouvez pas rĂ©pondre aux sujets dans ce forumRechercherune carte Yu-Gi-Oh! : Recherche AvancĂ©e - Voir la liste. 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LECONTE DE LISLE LECONTE DE LISLE 1818 Charles-Marie Leconte de Lisle, nĂ© Ă lâĂźle Bourbon en 1818, a publiĂ© successivement les PoĂšmes antiques, les PoĂšmes barbares, les PoĂšmes tragiques. Il a, en outre, donnĂ© des traductions dâHomĂšre, dâHĂ©siode, dâEschyle, de Sophocle, dâEuripide, de ThĂ©ocrite, dâHorace. Des vers dâune splendeur prĂ©cise, une sĂ©rĂ©nitĂ© imperturbable, voilĂ ce qui frappe tout dâabord chez M. Leconte de Lisle. Au fond, il y a autre chose que nous verrons, mais cela est cachĂ© et ne se rĂ©vĂšle quâĂ ceux qui nâont pas le cĆur simple. Il ne faut pas oublier que Leconte de Lisle est nĂ© Ă lâĂźle Bourbon et quâil y a passĂ© son enfance. LĂ , mieux que chez nous, il put sentir lâĂ©normitĂ© indomptable des forces naturelles et les lourds midis endormeurs de la conscience et de la volontĂ©. Il connut la rĂȘverie sans tendresse, le sentiment de notre impuissance Ă lâĂ©gard des choses, la soif de rentrer au grand Tout, dont la vie un moment nous distingue, et, en attendant, la joie immobile de contempler de splendides tableaux sans y chercher autre chose que leur beautĂ©. Il vint Ă Paris. AprĂšs la fatalitĂ© inconsciente des choses, il rencontra la fatalitĂ© furieuse de lâĂ©goĂŻsme humain. Il eut des jours difficiles, et souffrit dâautant plus quâil apportait dans la mĂȘlĂ©e des compĂ©titions fĂ©roces une Ăąme dĂ©jĂ touchĂ©e de la grave songerie orientale. Il lut lâhistoire. Il vit lâhomme en proie Ă deux fatalitĂ©s celle des passions et celle du monde extĂ©rieur. Elle lui apparut comme lâuniverselle tragĂ©die du mal, comme le drame de la force sombre et douloureuse. Il lui sembla que lâhomme, presque toujours, avait aggravĂ© lâhorreur de son destin par les explications quâil en avait donnĂ©es, par les religions qui avaient hantĂ© son esprit malade, prĂȘtant Ă ses dieux les passions dont il Ă©tait agitĂ©. Il se dit alors que la vie est mauvaise et que lâaction est inutile ou funeste. Mais, dâautre part, il fut sĂ©duit par le pittoresque et la variĂ©tĂ© plastique de lâhistoire humaine, par les tableaux dont elle occupe lâimagination au point de nous faire oublier nos colĂšres et nos douleurs. Il entra par lâĂ©tude dans les mĆurs et dans lâesthĂ©tique des siĂšcles morts ; il dĂ©mĂȘla lâempreinte que les gĂ©nĂ©rations reçoivent de la terre, du climat et des ancĂȘtres ; et il eut des visions du passĂ© si nettes, si sensibles et si grandioses, quâil leur pardonna de nâĂȘtre pas consolantes. Enfin, il comprit que si tout le mal vient de lâaction, lâaction vient du dĂ©sir inextinguible, de lâillusion du mieux qui vit Ă©ternellement aux flancs de lâhumanitĂ©, illusion qui fait souffrir puisquâelle fait vivre, mais qui fait vivre enfin. Or, Ă quoi bon condamner la vie ? Elle est, cela suffit ; et les renonciations de quelques-uns ne lâĂ©teindront pas. Qui sait, dâailleurs, si elle ne va pas quelque part ? si quelque progrĂšs â lent, ah ! combien lent ! â ne sâĂ©labore pas par elle Ă travers les Ăąges ? Alors, le cĆur rĂ©voltĂ© contre lâĂtre, mais les yeux pleins du prestige de ses formes ; indignĂ© des monstruositĂ©s de lâhistoire, mais dĂ©sarmĂ© par lâintĂ©rĂȘt de son mĂ©canisme et Ă©bloui par la richesse de ses dĂ©cors ; soulevĂ© contre le spectre des religions, mais apaisĂ© par lâidĂ©e quâun jour peut-ĂȘtre elles auront vĂ©cu ; conspuant lâhumanitĂ© et lâadorant Ă la fois, il alla prendre pour hĂ©ros lâantique rebelle, le premier aprĂšs Lucifer qui ait criĂ© Non serviam ! rendit lâespoir au dĂ©sespĂ©rĂ© et le fit surgir comme un prophĂšte sur la plus haute tour dâHĂ©nokia, la citĂ© cyclopĂ©enne. Il mit dans ce poĂšme ce quâil avait de plus sincĂšre en lui, la protestation obstinĂ©e contre le mal physique et moral, et aussi la sĂ©rĂ©nitĂ© de lâartiste paisiblement enivrĂ© de visions prĂ©cises. Ce jour-lĂ , M. Leconte de Lisle fit son chef-dâĆuvre. Le mĂȘme pessimisme, et, comme consĂ©quence, le mĂȘme parti pris de ne peindre que lâextĂ©rieur, se retrouvent dans les paysages. Presque tous appartiennent Ă lâOrient ou mĂȘme Ă la rĂ©gion des tropiques, et flambent crĂ»ment sous le soleil vertical. Le choix du poĂšte sâexplique de mĂȘme quâil nâa pas vu la justice dans lâhistoire, il ne lui plaĂźt pas de voir la tendresse dans la nature. Il ne sent point en elle, comme dâautres, une Ăąme vague, immense et bienveillante elle lui est un spectacle, non un refuge. Il la regarde, et câest tout. Mais il la voit si bien et la traduit par des assemblages de mots si merveilleux, que cela suffit Ă le consoler ; et cette consolation est sans duperie. Rien nâest plus moderne, sous ses formes boudhiques, grecques ou mĂ©diĂ©vales, que la poĂ©sie de M. Leconte de Lisle. Lâhomme comprend sur le tard que contre lâAnankĂš, contre le mal universel, rien ne vaut mieux, rien nâest plus fort que la protestation du contemplateur qui ne veut pas pleurer. Peut-ĂȘtre aussi quâĂ y regarder de prĂšs, rien nâĂ©gale le tragique rentrĂ©, lâamertume intĂ©rieure que ce genre de protestation fait deviner. Mais cela est oubliĂ© lorsquâon atteint au templa serena. Le mĂ©pris des Ă©motions vulgaires et le pessimisme spĂ©culatif donnent un orgueil dĂ©licieux. Cet orgueil est-il mauvais ? Je ne sais. Quâon se rassure, du reste il nâempĂȘchera pas dâagir et de souffrir. LâĂ©tat dâesprit oĂč nous met la poĂ©sie de M. Leconte de Lisle, une fois quâon y est installĂ©, est le moins susceptible de trouble et de douleur ; et cette poĂ©sie est pour longtemps, je le crois, Ă lâabri de la banalitĂ©, le domaine quâelle exploite Ă©tant beaucoup moins Ă©puisĂ© que celui des passions et des affections humaines tant ressassĂ©es. De lĂ , pour les initiĂ©s, lâattrait puissant des PoĂšmes antiques et des PoĂšmes barbares. Les Ćuvres de M. Leconte de Lisle ont Ă©tĂ© publiĂ©es par A. Lemerre. Jules LemaĂźtre. ________ HYPATIE Au dĂ©clin des grandeurs qui dominent la terre, Quand les cultes divins, sous les siĂšcles ployĂ©s, Reprenant de lâoubli le sentier solitaire, Regardent sâĂ©crouler leurs autels foudroyĂ©s ; Quand du chĂȘne dâHellas la feuille vagabonde Des parvis dĂ©sertĂ©s efface le chemin, Et quâau delĂ des mers, oĂč lâombre Ă©paisse abonde, Vers un jeune soleil flotte lâesprit humain ; Toujours des Dieux vaincus embrassant la fortune, Un grand cĆur les dĂ©fend du sort injurieux Lâaube des jours nouveaux le blesse et lâimportune Il suit Ă lâhorizon lâastre de ses aĂŻeux. Pour un destin meilleur quâun autre siĂšcle naisse Et dâun monde Ă©puisĂ© sâĂ©loigne sans remords FidĂšle au songe heureux oĂč fleurit sa jeunesse, Il entend tressaillir la poussiĂšre des morts. Les sages, les hĂ©ros se lĂšvent pleins de vie ! Les poĂštes en chĆur murmurent leurs beaux noms ; Et lâOlympe idĂ©al, quâun chant sacrĂ© convie, Sur lâivoire sâassied dans les blancs ParthĂ©nons. Ă vierge, qui, dâun pan de ta robe pieuse, Couvris la tombe auguste oĂč sâendormaient tes Dieux, De leur culte Ă©clipsĂ© prĂȘtresse harmonieuse, Chaste et dernier rayon dĂ©tachĂ© de leurs cieux ! Je tâaime et te salue, ĂŽ vierge magnanime ! Quand lâorage Ă©branla le monde paternel, Tu suivis dans lâexil cet Ćdipe sublime, Et tu lâenveloppas dâun amour Ă©ternel. Debout, dans ta pĂąleur, sous les sacrĂ©s portiques Que des peuples ingrats abandonnait lâessaim, Pythonisse enchaĂźnĂ©e aux trĂ©pieds prophĂ©tiques, Les Immortels trahis palpitaient dans ton sein. Tu les voyais passer dans la nue enflammĂ©e ! De science et dâamour ils tâabreuvaient encor ; Et la terre Ă©coutait, de ton rĂȘve charmĂ©e, Chanter lâabeille attique entre tes lĂšvres dâor. Comme un jeune lotos croissant sous lâĆil des sages, Fleur de leur Ă©loquence et de leur Ă©quitĂ©, Tu faisais, sur la nuit moins sombre des vieux Ăąges, Resplendir ton gĂ©nie Ă travers ta beautĂ© ! Le grave enseignement des vertus Ă©ternelles SâĂ©panchait de ta lĂšvre au fond des cĆurs charmĂ©s ; Et les GalilĂ©ens qui te rĂȘvaient des ailes Oubliaient leur Dieu mort pour tes Dieux bien aimĂ©s. Mais le siĂšcle emportait ces Ăąmes insoumises Quâun lien trop fragile enchaĂźnait Ă tes pas ; Et tu les voyais fuir vers les terres promises ; Mais toi qui savais tout, tu ne les suivis pas ! Que tâimportait, ĂŽ vierge, un semblable dĂ©lire ? Ne possĂ©dais-tu pas cet idĂ©al cherchĂ© ? Va ! dans ces cĆurs troublĂ©s tes regards savaient lire, Et les Dieux bienveillants ne tâavaient rien cachĂ©. Ă sage enfant, si pure entre tes sĆurs mortelles ! Ă noble front, sans tache entre les fronts sacrĂ©s ! Quelle Ăąme avait chantĂ© sur des lĂšvres plus belles, Et brĂ»lĂ© plus limpide en des yeux inspirĂ©s ? Sans effleurer jamais ta robe immaculĂ©e, Les souillures du siĂšcle ont respectĂ© tes mains Tu marchais, lâĆil tournĂ© vers la Vie Ă©toilĂ©e, Ignorante des maux et des crimes humains. Le vil GalilĂ©en tâa frappĂ©e et maudite, Mais tu tombas plus grande ! Et maintenant, hĂ©las ! Le souffle de Platon et le corps dâAphrodite Sont partis Ă jamais pour les beaux cieux dâHellas ! Dors, ĂŽ blanche victime, en notre Ăąme profonde, Dans ton linceul de vierge et ceinte de lotos ; Dors ! Lâimpure laideur est la reine du monde, Et nous avons perdu le chemin de Paros. Les Dieux sont en poussiĂšre et la terre est muette ; Rien ne parlera plus dans ton ciel dĂ©sertĂ©. Dors ! mais vivante en lui, chante au cĆur du poĂšte Lâhymne mĂ©lodieux de la sainte BeautĂ©. Elle seule survit, immuable, Ă©ternelle. La mort peut disperser les univers tremblants, Mais la BeautĂ© flamboie, et tout renaĂźt en elle, Et les mondes encor roulent sous ses pieds blancs ! PoĂšmes antiques __________ MIDI Midi, roi des Ă©tĂ©s, Ă©pandu sur la plaine, Tombe en nappes dâargent des hauteurs du ciel bleu. Tout se tait. Lâair flamboie et brĂ»le sans haleine ; La terre est assoupie en sa robe de feu. LâĂ©tendue est immense, et les champs nâont point dâombre, Et la source est tarie oĂč buvaient les troupeaux ; La lointaine forĂȘt, dont la lisiĂšre est sombre, Dort lĂ -bas, immobile, en un pesant repos. Seuls, les grands blĂ©s mĂ»ris, tels quâune mer dorĂ©e, Se dĂ©roulent au loin, dĂ©daigneux du sommeil ; Pacifiques enfants de la terre sacrĂ©e, Ils Ă©puisent sans peur la coupe du soleil. Parfois, comme un soupir de leur Ăąme brĂ»lante, Du sein des Ă©pis lourds qui murmurent entre eux, Une ondulation majestueuse et lente SâĂ©veille, et va mourir Ă lâhorizon poudreux. Non loin, quelques bĆufs blancs, couchĂ©s parmi les herbes, Bavent avec lenteur sur leurs fanons Ă©pais, Et suivent de leurs yeux languissants et superbes Le songe intĂ©rieur quâils nâachĂšvent jamais. Homme, si, le cĆur plein de joie ou dâamertume, Tu passais vers midi dans les champs radieux, Fuis ! La nature est vide et le soleil consume Rien nâest vivant ici, rien nâest triste ou joyeux. Mais si, dĂ©sabusĂ© des larmes et du rire, AltĂ©rĂ© de lâoubli de ce monde agitĂ©, Tu veux, ne sachant plus pardonner ou maudire, GoĂ»ter une suprĂȘme et morne voluptĂ©, Viens ! Le soleil te parle en paroles sublimes ; Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ; Et retourne Ă pas lents vers les citĂ©s infimes, Le cĆur trempĂ© sept fois dans le nĂ©ant divin. PoĂšmes antiques ______ DIES IRĂ Il est un jour, une heure, oĂč dans le chemin rude, CourbĂ© sous le fardeau des ans multipliĂ©s, LâEsprit humain sâarrĂȘte, et, pris de lassitude, Se retourne pensif vers les jours oubliĂ©s. La vie a fatiguĂ© son attente infĂ©conde ; DĂ©sabusĂ© du Dieu qui ne doit point venir, Il sent renaĂźtre en lui la jeunesse du monde ; Il Ă©coute ta voix, ĂŽ sacrĂ© souvenir ! Les astres quâil aima, dâun rayon pacifique Argentent dans la nuit les bois mystĂ©rieux, Et la sainte montagne et la vallĂ©e antique OĂč sous les noirs palmiers dormaient les premiers Dieux. Il voit la terre libre, et les verdeurs sauvages Flotter comme un encens sur les fleuves sacrĂ©s, Et les bleus OcĂ©ans, chantant sur leurs rivages, Vers lâinconnu divin rouler immesurĂ©s. De la hauteur des monts, berceaux des races pures, Au murmure des flots, au bruit des dĂŽmes verts, Il Ă©coute grandir, vierge encor de souillures, La jeune HumanitĂ© sur le jeune Univers. Bienheureux ! Il croyait la terre impĂ©rissable, Il entendait parler au prochain firmament ; Il nâavait point tachĂ© sa robe irrĂ©prochable ; Dans la beautĂ© du monde il vivait fortement. LâĂ©clair qui fait aimer et qui nous illumine Le brĂ»lait sans faiblir un siĂšcle comme un jour ; Et la foi confiante et la candeur divine Veillaient au sanctuaire oĂč rayonnait lâamour. Pourquoi sâest-il lassĂ© des voluptĂ©s connues ? Pourquoi les vains labeurs et lâavenir tentĂ© ? Les vents ont Ă©paissi lĂ -haut les noires nues ; Dans une heure dâorage ils ont tout emportĂ©. Oh ! la tente au dĂ©sert et sur les monts sublimes, Les grandes visions sous les cĂšdres pensifs, Et la LibertĂ© vierge et ses cris magnanimes, Et le dĂ©bordement des transports primitifs ! Lâangoisse du dĂ©sir vainement nous convie Au livre originel qui lira dĂ©sormais ? Lâhomme a perdu le sens des paroles de vie Lâesprit se tait, la lettre est morte pour jamais. Nul nâĂ©cartera plus vers les couchants mystiques La pourpre suspendue au devant de lâautel, Et nâentendra passer dans les vents prophĂ©tiques Les premiers entretiens de la Terre et du Ciel. Les lumiĂšres dâen haut sâen vont diminuĂ©es, LâimpĂ©nĂ©trable nuit tombe dĂ©jĂ des cieux, Lâastre du vieil Ormuzd est mort sous les nuĂ©es LâOrient sâest couchĂ© dans la cendre des Dieux. LâEsprit ne descend plus sur la race choisie ; Il ne consacre plus les justes et les forts. Dans le sein dessĂ©chĂ© de lâimmobile Asie Les soleils infĂ©conds brĂ»lent les germes morts. Les AscĂštes, assis dans les roseaux du fleuve, Ăcoutent murmurer le flot tardif et pur. Pleurez, contemplateurs ! Votre sagesse est veuve Viçnou ne siĂšge plus sur le Lotus dâazur. Lâharmonieuse Hellas, vierge aux tresses dorĂ©es, Ă qui lâamour dâun monde a dressĂ© des autels, GĂźt, muette Ă jamais, au bord des mers sacrĂ©es, Sur les membres divins de ses blancs Immortels. Plus de charbon ardent sur la lĂšvre-prophĂšte ! AdonaĂŻ, les vents ont emportĂ© ta voix ; Et le NazarĂ©en, pĂąle et baissant la tĂȘte, Pousse un cri de dĂ©tresse une derniĂšre fois. Figure aux cheveux roux, dâombre et de paix voilĂ©e, Errante au bord des lacs sous ton nimbe de feu, Salut ! LâhumanitĂ©, dans ta tombe scellĂ©e, Ă jeune EssĂ©nien, garde son dernier Dieu ! Et lâOccident barbare est saisi de vertige. Les Ăąmes sans vertu dorment dâun lourd sommeil, Comme des arbrisseaux, viciĂ©s dans leur tige, Qui nâont verdi quâun jour et nâont vu quâun soleil. Et les sages, couchĂ©s sous les secrets portiques, Regardent, possĂ©dant le calme souhaitĂ©, Les Ă©poques dâorage et les temps pacifiques Rouler dâun cours Ă©gal lâhomme Ă lâĂ©ternitĂ©. Mais nous, nous, consumĂ©s dâune impossible envie, En proie au mal de croire et dâaimer sans retour, RĂ©pondez, jours nouveaux, nous rendrez-vous la vie ? Dites, ĂŽ jours anciens, nous rendrez-vous lâamour ? OĂč sont nos lyres dâor, dâhyacinthe fleuries, Et lâhymne aux Dieux heureux et les vierges en chĆur, Ăleusis et DĂ©los, les jeunes ThĂ©ories, Et les poĂšmes saints qui jaillissaient du cĆur ? OĂč sont les Dieux promis, les formes idĂ©ales, Les grands cultes de pourpre et de gloire vĂȘtus, Et dans les cieux ouvrant ses ailes triomphales La blanche ascension des sereines Vertus ? Les Muses, Ă pas lents, mendiantes divines, Sâen vont par les citĂ©s en proie au rire amer. Ah ! câest assez saigner sous le bandeau dâĂ©pines, Et pousser un sanglot sans fin comme la mer. Oui ! le mal Ă©ternel est dans sa plĂ©nitude ! Lâair du siĂšcle est mauvais aux esprits ulcĂ©rĂ©s. Salut, oubli du monde et de la multitude ! Reprends-nous, ĂŽ Nature, entre tes bras sacrĂ©s ! Dans ta khlamyde dâor, Aube mystĂ©rieuse, Ăveille un chant dâamour au fond des bois Ă©pais ! DĂ©roule encor, Soleil, ta robe glorieuse ! Montagne, ouvre ton sein plein dâarĂŽme et de paix ! Soupirs majestueux des ondes apaisĂ©es, Murmurez plus profonds en nos cĆurs soucieux ! RĂ©pandez, ĂŽ forĂȘts, vos urnes de rosĂ©es ! Ruisselle en nous, silence Ă©tincelant des cieux ! Consolez-nous enfin des espĂ©rances vaines La route infructueuse a blessĂ© nos pieds nus. Du sommet des grands caps, loin des rumeurs humaines, Ă vents ! emportez-nous vers les Dieux inconnus ! Mais si rien ne rĂ©pond dans lâimmense Ă©tendue, Que le stĂ©rile Ă©cho de lâĂ©ternel dĂ©sir, Adieu, dĂ©serts, oĂč lâĂąme ouvre une aile Ă©perdue ! Adieu, songe sublime, impossible Ă saisir ! Et toi, divine Mort, oĂč tout rentre et sâefface, Accueille tes enfants dans ton sein Ă©toile ; Affranchis-nous du temps, du nombre et de lâespace, Et rends-nous le repos que la vie a troublĂ© ! PoĂšmes antiques ______ LE JUGEMENT DE KOMOR La lune sous la nue errait en mornes flammes, Et la tour de Komor, du Jarle de Kemper, Droite et ferme, montait dans lâĂ©cume des lames. Sous le fouet redoublĂ© des rafales dâhiver La tour du vieux Komor dressait sa masse haute, Telle quâun cormoran qui regarde la mer. Un grondement immense enveloppait la cĂŽte. Sur les flots palpitaient, blĂȘmes, de toutes parts, Les Ăąmes des noyĂ©s qui moururent en faute. Et la grĂȘle tintait contre les noirs remparts, Et le vent secouait la herse aux lourdes chaĂźnes Et tordait les grands houx sur les talus Ă©pars. Dans les fourrĂ©s craquaient les rameaux morts des chĂȘnes, Tandis que par instants un maigre carnassier Hurlait lugubrement sur les dunes prochaines. Or, au feu dâune torche en un flambeau grossier, Le Jarle, dans sa tour vieille que la mer ronge, Marchait, les bras croisĂ©s sur sa cotte dâacier. Muet, sourd au fracas qui roule et se prolonge, Comprimant de ses poings la rage de son cĆur, Le Jarle sâagitait comme en un mauvais songe. CâĂ©tait un haut vieillard, sombre et plein de vigueur. Sur sa joue aux poils gris, lourde, une larme vive De lâangoisse soufferte accusait la rigueur. Au fond, contre le mur, tel quâune ombre pensive, Un grand Christ. Une cloche auprĂšs. Sur un bloc bas Une Ă©pĂ©e au pommeau de fer, nue et massive. â Ce moine, dit Komor, nâen finira-t-il pas ? â Il ploya, ce disant, les genoux sur la dalle, Devant le crucifix de chĂȘne, et pria bas. On entendit sonner le bruit dâune sandale Un homme Ă robe brune Ă©carta lentement LâĂ©pais rideau de cuir qui fermait cette salle. â Jarle ! jâai fait selon votre commandement, AprĂšs celui de Dieu, dit le moine. Ă cette heure, Ne souillez pas vos mains, Jarle ! soyez clĂ©ment. â â Sire moine, il suffit. Sors. Il faut quâelle meure, Celle qui, mĂ©prisant le saint nĆud qui nous joint, Fit entrer lĂąchement la honte en ma demeure. Mais la main dâun vil serf ne la touchera point â Et le moine sortit ; et Komor, sur la cloche, Comme dâun lourd marteau, frappa deux fois du poing. Le tintement sinistre alla, de proche en proche, Se perdre aux bas arceaux oĂč les ancĂȘtres morts Dormaient, les bras en croix, sans peur et sans reproche. Puis tout se tut. Le vent faisait rage au dehors ; Et la mer, soulevant ses lames furibondes, Ăbranlait lâescalier crevassĂ© de ses bords. Une femme, Ă pas lents, trĂšs belle, aux tresses blondes, De blanc vĂȘtue, aux yeux calmes, tristes et doux, Entra, se dĂ©tachant des tĂ©nĂšbres profondes. Elle vit, sans trembler ni flĂ©chir les genoux, Le crucifix, le bloc, lâĂ©pĂ©e hors de la gaine, Et, muette, se tint devant le vieil Ă©poux. Lui, plus pĂąle, frĂ©mit, plein dâamour et de haine, Lâenveloppa longtemps dâun regard sans merci, Puis dit dâune voix sourde â Il faut mourir, Tiphaine. â â Sire Jarle, que Dieu vous garde ! Me voici. Jâai suppliĂ© JĂ©sus, Notre-Dame et sainte Anne ; DĂ©sormais je suis prĂȘte. Or, nâayez nul souci. â Tiphaine, indigne enfant des braves chefs de Vanne, Opprobre de ta race et honte de Komor, Conjure le Sauveur, afin quâil ne te damne ; Jâai souffert trĂšs longtemps je puis attendre encor. â Le Jarle recula dans lâangle du mur sombre, Et Tiphaine pria sous ses longs cheveux dâor. Et sur le bloc lâĂ©pĂ©e Ă©tincelait dans lâombre, Et la torche Ă©pandait sa sanglante clartĂ©, Et la nuit dĂ©roulait toujours ses bruits sans nombre. Tiphaine sâoublia dans un rĂȘve enchanté⊠Elle ceignit son front de roses en guirlande, Comme aux jours de sa joie et de sa puretĂ©. Elle erra, respirant ton frais arome, ĂŽ lande ! Elle revint suspendre, ĂŽ Vierge, Ă ton autel Le voile aux fleurs dâargent et son Ăąme en offrande. Et voici quâelle aima dâun amour immortel ! Saintes heures de foi, dâespĂ©rance cĂ©leste, Elle vit dans son cĆur se rouvrir votre ciel ! Puis un brusque nuage, une union funeste Le grave et vieil Ă©poux au lieu du jeune amant⊠De lâaurore divine, hĂ©las ! rien qui lui reste ! Le retour de celui quâelle aimait ardemment, Les combats, les remords, la passion plus forte, La chute irrĂ©parable et son enivrement⊠JĂ©sus ! tout est fini maintenant ; mais quâimporte ! Le sang du fier jeune homme a coulĂ© sous le fer, Et Komor peut frapper Tiphaine est dĂ©jĂ morte. â Femme, te repens-tu ? Câest le ciel ou lâenfer. De ton sang rĂ©signĂ© laveras-tu ton crime ? Je ne veux pas tuer ton Ăąme avec ta chair. â â Frappe. Je lâaime encor ta haine est lĂ©gitime. Certes, je lâaimerai dans mon Ă©ternitĂ© ! Dieu mâait en sa merci ! Pour toi, prends ta victime. â â Meurs donc dans ta traĂźtrise et ton impuretĂ© ! Dit Komor, avançant dâun pas grave vers elle ; Car Dieu va te juger selon son Ă©quitĂ©. â Tiphaine souleva de son Ă©paule frĂȘle Ses beaux cheveux dorĂ©s, et posa pour mourir Sur le funĂšbre bloc sa tĂȘte pĂąle et belle. On eĂ»t pu voir alors flamboyer et courir Avec un sifflement lâĂ©pĂ©e Ă large lame, Et du col convulsif le sang tiĂšde jaillir. Tiphaine tomba froide, ayant rendu son Ăąme. Cela fait, le vieux Jarle, entre ses bras sanglants, Prit le corps et la tĂȘte aux yeux hagards, sans flamme. Il monta sur la tour, et dans les flots hurlants PrĂ©cipita dâen haut la dĂ©pouille livide De celle qui voulut trahir ses cheveux blancs. Morne, il la regarda tournoyer par le vide⊠Puis la tĂȘte et le corps entrĂšrent Ă la fois Dans la nuit furieuse et dans le gouffre avide. Alors le Jarle fit un long signe de croix ; Et, comme un insensĂ©, poussant un cri sauvage Que le vent emporta par delĂ les grands bois, Debout sur les crĂ©neaux balayĂ©s par lâorage, Les bras tendus au ciel, il sauta dans la mer Qui ne rejeta point ses os sur le rivage. Tels finirent Tiphaine et Komor de Kemper. PoĂšmes barbares ______ LA VĂRANDAH Au tintement de lâeau dans les porphyres roux Les rosiers de lâIran mĂȘlent leurs frais murmures, Et les ramiers rĂȘveurs leurs roucoulements doux. Tandis que lâoiseau grĂȘle et le frelon jaloux, Sifflant et bourdonnant, mordent les figues mĂ»res, Les rosiers de lâIran mĂȘlent leurs frais murmures Au tintement de lâeau dans les porphyres roux. Sous les treillis dâargent de la vĂ©randah close, Dans lâair tiĂšde embaumĂ© de lâodeur des jasmins, OĂč la splendeur du jour darde une flĂšche rose, La Persane royale, immobile, repose, DerriĂšre son col brun croisant ses belles mains, Dans lâair tiĂšde, embaumĂ© de lâodeur des jasmins, Sous les treillis dâargent de la vĂ©randah close. Jusquâaux lĂšvres que lâambre arrondi baise encor, Du cristal dâoĂč sâĂ©chappe une vapeur subtile Qui monte en tourbillons lĂ©gers et prend lâessor, Sur les coussins de soie Ă©carlate, aux fleurs dâor, La branche du hĂ»ka rĂŽde comme un reptile. Du cristal dâoĂč sâĂ©chappe une vapeur subtile Jusquâaux lĂšvres que lâambre arrondi baise encor. Deux rayons noirs, chargĂ©s dâune muette ivresse, Sortent de ses longs yeux entrouverts Ă demi ; Un songe lâenveloppe, un souffle la caresse ; Et parce que lâeffluve invincible lâoppresse, Parce que son beau sein qui se gonfle a frĂ©mi, Sortent de ses longs yeux entrâouverts Ă demi Deux rayons noirs, chargĂ©s dâune muette ivresse. Et lâeau vive sâendort dans les porphyres roux, Les rosiers de lâIran ont cessĂ© leurs murmures, Et les ramiers rĂȘveurs leurs roucoulements doux. Tout se tait. Lâoiseau grĂȘle et le frelon jaloux Ne se querellent plus autour des figues mĂ»res ; Les rosiers de lâIran ont cessĂ© leurs murmures, Et lâeau vive sâendort dans les porphyres roux. PoĂšmes barbares ______ LES ĂLĂPHANTS Le sable rouge est comme une mer sans limite, Et qui flambe, muette, affaissĂ©e en son lit. Une ondulation immobile remplit Lâhorizon aux vapeurs de cuivre oĂč lâhomme habite. Nulle vie et nul bruit. Tous les lions repus Dorment au fond de lâantre Ă©loignĂ© de cent lieues, Et la girafe boit dans les fontaines bleues, LĂ -bas, sous les dattiers des panthĂšres connus. Pas un oiseau ne passe en fouettant de son aile Lâair Ă©pais oĂč circule un immense soleil. Parfois quelque boa, chauffĂ© dans son sommeil, Fait onduler son dos dont lâĂ©caillĂ© Ă©tincelle. Tel lâespace enflammĂ© brĂ»le sous les cieux clairs. Mais, tandis que tout dort aux mornes solitudes, Les Ă©lĂ©phants rugueux, voyageurs lents et rudes, Vont au pays natal Ă travers les dĂ©serts. Dâun point de lâhorizon, comme des masses brunes, Ils viennent, soulevant la poussiĂšre, et lâon voit, Pour ne point dĂ©vier du chemin le plus droit, Sous leur pied large et sĂ»r crouler au loin les dunes. Celui qui tient la tĂȘte est un vieux chef. Son corps Est gercĂ© comme un tronc que le temps ronge et mine ; Sa tĂȘte est comme un roc, et lâarc de son Ă©chine Se voĂ»te puissamment Ă ses moindres efforts. Sans ralentir jamais et sans hĂąter sa marche, Il guide au but certain ses compagnons poudreux ; Et, creusant par derriĂšre un sillon sablonneux, Les pĂšlerins massifs suivent leur patriarche. Lâoreille en Ă©ventail, la trompe entre les dents, Ils cheminent, lâĆil clos. Leur ventre bat et fume, Et leur sueur dans lâair embrasĂ© monte en brume ; Et bourdonnent autour mille insectes ardents. Mais quâimportent la soif et la mouche vorace, Et le soleil cuisant leur dos noir et plissĂ© ? Ils rĂȘvent en marchant du pays dĂ©laissĂ©, Des forĂȘts de figuiers oĂč sâabrita leur race. Ils reverront le fleuve Ă©chappĂ© des grands monts, OĂč nage en mugissant lâhippopotame Ă©norme, OĂč, blanchis par la lune et projetant leur forme, Ils descendaient pour boire en Ă©crasant les joncs. Aussi, pleins de courage et de lenteur, ils passent Comme une ligne noire, au sable illimitĂ© ; Et le dĂ©sert reprend son immobilitĂ© Quand les lourds voyageurs Ă lâhorizon sâeffacent. PoĂšmes barbares ______ LE MANCHY Sous un nuage frais de claire mousseline, Tous les dimanches au matin, Tu venais Ă la ville en manchy de rotin, Par les rampes de la colline. La cloche de lâĂ©glise alertement tintait ; Le vent de mer berçait les cannes ; Comme une grĂȘle dâor, aux pointes des savanes, Le feu du soleil crĂ©pitait. Le bracelet aux poings, lâanneau sur la cheville, Et le mouchoir jaune aux chignons, Deux Telingas portaient, assidus compagnons, Ton lit aux nattes de Manille. Ployant leur jarret maigre et nerveux, et chantant, Souples dans leurs tuniques blanches, Le bambou sur lâĂ©paule et les mains sur les hanches, Ils allaient le long de lâĂtang. Le long de la chaussĂ©e et des varangues basses OĂč les vieux crĂ©oles fumaient, Par les groupes joyeux des Noirs, ils sâanimaient Au bruit des bobres MadĂ©casses. Dans lâair lĂ©ger flottait lâodeur des tamarins ; Sur les houles illuminĂ©es, Au large, les oiseaux, en dâimmenses traĂźnĂ©es, Plongeaient dans les brouillards marins. Et tandis que ton pied, sorti de la babouche, Pendait, rose, au bord du manchy, Ă lâombre des Bois-noirs touffus et du Letchi Aux fruits moins pourprĂ©s que ta bouche ; Tandis quâun papillon, les deux ailes en fleur, TeintĂ© dâazur et dâĂ©carlate, Se posait par instants sur ta peau dĂ©licate En y laissant de sa couleur ; On voyait, au travers du rideau de batiste, Tes boucles dorer lâoreiller, Et, sous leurs cils mi-clos, feignant de sommeiller, Tes beaux yeux de sombre amĂ©thyste. Tu tâen venais ainsi, par ces matins si doux, De la montagne Ă la grandâmesse, Dans ta grĂące naĂŻve et ta rose jeunesse, Au pas rythmĂ© de tes Hindous. Maintenant, dans le sable aride de nos grĂšves, Sous les chiendents, au bruit des mers, Tu reposes parmi les morts qui me sont chers, Ă charme de mes premiers rĂȘves ! PoĂšmes barbares ______ LE SOMMEIL DU CONDOR Par delĂ lâescalier des roides CordillĂšres, Par delĂ les brouillards hantĂ©s des aigles noirs, Plus haut que les sommets creusĂ©s en entonnoirs OĂč bout le flux sanglant des laves familiĂšres, Lâenvergure pendante et rouge par endroits, Le vaste oiseau, tout plein dâune morne indolence, Regarde lâAmĂ©rique et lâespace en silence, Et le sombre soleil qui meurt dans ses yeux froids. La nuit roule de lâEst, oĂč les pampas sauvages Sous les monts Ă©tagĂ©s sâĂ©largissent sans fin ; Elle endort le Chili, les villes, les rivages, Et la mer Pacifique et lâhorizon divin ; Du continent muet elle sâest emparĂ©e Des sables aux coteaux, des gorges aux versants, De cime en cime, elle enfle, en tourbillons croissants, Le lourd dĂ©bordement de sa haute marĂ©e. Lui, comme un spectre, seul, au front du pic altier, BaignĂ© dâune lueur qui saigne sur la neige, Il attend cette mer sinistre qui lâassiĂšge Elle arrive, dĂ©ferle, et le couvre en entier. Dans lâabĂźme sans fond la Croix australe allume Sur les cĂŽtes du ciel son phare constellĂ©. Il rĂąle de plaisir, il agite sa plume, Il Ă©rige son cou musculeux et pelĂ©, Il sâenlĂšve en fouettant lâĂąpre neige des Andes, Dans un cri rauque il monte oĂč nâatteint pas le vent, Et, loin du globe noir, loin de lâastre vivant, Il dort dans lâair glacĂ©, les ailes toutes grandes. PoĂšmes barbares ______ UN COUCHER DE SOLEIL Sur la cĂŽte dâun beau pays, Par delĂ les flots pacifiques, Deux hauts palmiers Ă©panouis Bercent leurs palmes magnifiques. Ă leur ombre, tel quâun Nabab Qui, vers midi, rĂȘve et repose, Dort un grand tigre du Pendj-Ab, AllongĂ© sur le sable rose ; Et, le long des fĂ»ts lumineux, Comme au paradis des genĂšses, Deux serpents enroulent leurs nĆuds Dans une spirale de braises. AuprĂšs, un golfe de satin, OĂč le feuillage se reflĂšte, Baigne un vieux palais byzantin De brique rouge et violette. Puis, des cygnes noirs, par milliers, Lâaile ouverte au vent qui sây joue, Ourlent, au bas des escaliers, Lâeau diaphane avec leur proue. Lâhorizon est immense et pur ; Ă peine voit-on, aux cieux calmes, Descendre et monter dans lâazur La palpitation des palmes. Mais voici quâau couchant vermeil Lâoiseau Rok sâenlĂšve, Ă©carlate Dans son bec il tient le soleil, Et des foudres dans chaque patte. Sur le poitrail du vieil oiseau, Qui fume, pĂ©tille et sâembrase, Lâastre coule et fait un ruisseau Couleur dâor, dâambre et de topaze Niagara resplendissant, Ce fleuve sâĂ©croule aux nuĂ©es, Et rejaillit en y laissant Des Ă©cumes dâĂ©clairs trouĂ©es. Soudain le gĂ©ant Orion, Ou quelque sagittaire antique, Du cĂŽtĂ© du septentrion Dresse sa stature athlĂ©tique. Le chasseur tend son arc de fer Tout rouge au sortir de la forge, Et, faisant un pas sur la mer, Transperce le Rok Ă la gorge. Dâun coup dâaile lâoiseau sanglant Sâenfonce Ă travers lâĂ©tendue ; Et le soleil tombe en brĂ»lant, Et brise sa masse Ă©perdue. Alors des volutes de feu DĂ©vorent dâimmenses prairies, SâĂ©lancent, et, du zĂ©nith bleu, Pleuvent en flots de pierreries. Sur la face du ciel mouvant Gisent de flamboyants dĂ©combres ; Un dernier jet exhale au vent Des tourbillons de pourpre et dâombres ; Et, se dilatant par bonds lourds, Muette, sinistre, profonde, La nuit traĂźne son noir velours Sur la solitude du monde. PoĂšmes barbares ______ LA XIMENA En Castille, Ă Burgos, Hernan, le Justicier, Assis, les reins cambrĂ©s, dans sa chaise Ă dossier, Juge Ă©quitablement dĂ©mĂȘlĂ©s et tueries, Foi gardĂ©e en LĂ©on, traĂźtrise en Asturies, Riches-hommes, chauffĂ©s dâavarice, arrachant Son escarcelle au Juif et sa laine au marchand, Et ceux qui, rendant gorge aprĂšs leur Ă©quipĂ©e, Ont sauvĂ© le chaudron, la banniĂšre et lâĂ©pĂ©e. Or, les arrĂȘts transmis par les scribes, selon Les formes, au fĂ©al aussi bien quâau fĂ©lon, Les massiers dĂ©pĂȘchĂ©s, les sentences rendues, Les dĂ©linquants ayant payĂ© les sommes dues, Pour tout clore, il advient que trente fidalgos Entrent, de deuil vĂ©tus, et par deux rangs Ă©gaux. La Ximena Gomez marche au centre. Elle pleure Son pĂšre mort pour qui la vengeance est un leurre. La sombre cape enclĂŽt de plis roides et longs Son beau corps alangui, de lâĂ©paule aux talons ; Et, de lâombre que fait la coiffe et quâil Ă©claire, Sort comme un feu dâamour, dâangoisse et de colĂšre. Devant la chaise haute, en son chagrin cuisant, Elle heurte aux carreaux ses deux genoux, disant â Seigneur ! donc, câest dâavoir vĂ©cu sans peur ni blĂąme, Que, six mois bien passĂ©s, mon pĂšre a rendu lâĂąme Par les mains de celui qui, hardi cavalier, Sâen vient, pour engraisser son faucon familier, Meurtrir au colombier mes colombes fidĂšles Et me teindre la cotte au sang qui coule dâelles ! Don Rui Diaz de Vivar, cet orgueilleux garçon, MĂ©prise grandement, et de claire façon, De tous tes sĂ©nĂ©chaux la vaine chevauchĂ©e, Cette meute sans nez sur la piste lĂąchĂ©e, Et quâil raille, sachant, par flagrantes raisons, Que tu ne le veux point forcer en ses maisons. Suis-je dâun sang si vil, de race tant obscure, Roi, que du chĂątiment il nâait souci ni cure ? Je te le dis, câest faire affront Ă ton honneur Que de celer le traĂźtre Ă ma haine, Seigneur ! Il nâest point roi celui qui dĂ©faille en justice, Afin quâil plaise au fort et que lâhumble pĂątisse Sous lâinsolente main, chaude du sang versĂ© ! Et toi, plus ne devrais combattre, cuirassĂ© Ni casquĂ©, manger, boire, et te gaudir en somme, Avec la Reine, et dans son lit dormir ton somme, Puisque ayant quatre fois tes promesses reçu, Lâespoir de ma vengeance est quatre fois déçu, Et que dâun homme, ĂŽ Roi, haut et puissant naguĂšre, Le plus sage aux CortĂšs, le meilleur dans la guerre, Tu ne prends point la race orpheline en merci ! â La Ximena se tait quand elle a dit ceci. Hernan rĂ©pond Hernan rĂ©pond â Par Dieu qui juge ! damoiselle, Ta douloureuse amour explique assez ton zĂšle, Et câest parler fort bien. Fille, tes yeux si beaux Luiraient aux trĂ©passĂ©s roidis dans leurs tombeaux, Et tes pleurs aux vivants mouilleraient la paupiĂšre, Eussent-ils sous lâacier des cĆurs durs comme pierre. Apaise nĂ©anmoins le chagrin qui te mord. Si Lozano Gomez, le vaillant Comte est mort, Songe quâil offensa dâune atteinte trĂšs grave Lâhonneur dâun cavalier de souche honnĂȘte et brave, Plus riche quâIñigo, plus noble quâAbarca, Du vieux Diego Lainez Ă qui force manqua. Le Comte est mort dâun coup loyal, et, tout lâatteste, Dieu dans son paradis lâa reçu sans conteste. Si je garde don Rui, fille, câest quâil est tien. Certes, un temps viendra quâil sera ton soutien, Changeant dĂ©tresse en joie et gloire triomphante. â Puis, cela dit, tous deux entrĂšrent chez lâInfante. PoĂšmes barbares ____________ LâILLUSION SUPRĂME Quand lâhomme approche enfin des sommets oĂč la vie Va plonger dans votre ombre inerte, ĂŽ mornes cieux ! Debout sur la hauteur aveuglĂ©ment gravie, Les premiers jours vĂ©cus Ă©blouissent ses yeux. Tandis que la nuit monte et dĂ©borde les grĂšves, Il revoit, au delĂ de lâhorizon lointain, Tourbillonner le vol des dĂ©sirs et des rĂȘves Dans la rose clartĂ© de son heureux matin. Monde lugubre, oĂč nul ne voudrait redescendre Par le mĂȘme chemin solitaire, Ăąpre et lent, Vous, stĂ©riles soleils, qui nâĂȘtes plus que cendre, Et vous, ĂŽ pleurs muets, tombĂ©s dâun cĆur sanglant ! Celui qui va goĂ»ter le sommeil sans aurore Dont lâhomme ni le Dieu nâont pu rompre le sceau, Chair qui va disparaĂźtre, Ăąme qui sâĂ©vapore, Sâemplit des visions qui hantaient son berceau. Rien du passĂ© perdu qui soudain ne renaisse La montagne natale et les vieux tamarins, Les chers morts qui lâaimaient au temps de sa jeunesse Et qui dorment lĂ -bas dans les sables marins. Sous les lilas gĂ©ants oĂč vibrent les abeilles, Voici le vert coteau, la tranquille maison, Les grappes de Letchis, et les mangues vermeilles, Et lâoiseau bleu dans le maĂŻs en floraison ; Aux pentes des Pitons, parmi les cannes grĂȘles Dont la peau dâambre mĂ»r sâouvre au jus attiĂ©di, Le vol vif et strident des roses sauterelles Qui sâenivrent de la lumiĂšre de midi ; Les cascades, en un brouillard de pierreries, Versant du haut des rocs leur neige en Ă©ventail ; Et la bise embaumĂ©e autour des sucreries, Et le fourmillement des Hindous au travail ; Le cafĂ© rouge, par monceaux, sur lâaire sĂšche, Dans les mortiers massifs le son des calaous, Les grands parents assis sous la varangue fraĂźche, Et les rires dâenfants Ă lâombre des bambous ; Le ciel vaste oĂč le mont dentelĂ© se profile, Lorsque ta pourpre, ĂŽ soir, le revĂȘt tout entier ! Et le chant triste et doux des Bandes Ă la file Qui sâen viennent des hauts et sâen vont au quartier. Voici les bassins clairs entre les blocs de lave ; Par les sentiers de la savane, vers lâenclos, Le beuglement des bĆufs bossus de Tamatave MĂȘlĂ© dans lâair sonore au murmure des flots, Et sur la cĂŽte, au pied des dunes de Saint-Gilles, Le long de son corail merveilleux et changeant, Comme un essaim dâoiseaux les pirogues agiles Trempant leur aile aiguĂ« aux Ă©cumes dâargent. Puis, tout sâapaise et dort. La lune se balance, Perle Ă©clatante, au fond des cieux dâastres emplis ; La mer soupire et semble accroĂźtre le silence, Et berce le reflet des mondes dans ses plis. Mille aromes lĂ©gers Ă©manent des feuillages OĂč la mouche dâor rĂŽde, Ă©tincelle et bruit ; Et les feux des chasseurs, sur les mornes sauvages, Jaillissent dans le bleu splendide de la nuit. Et tu renais aussi, fantĂŽme diaphane, Qui fis battre son cĆur pour la premiĂšre fois, Et, fleur cueillie avant que le soleil te fane, Ne parfumas quâun jour lâombre calme des bois ! Ă chĂšre Vision, toi qui rĂ©pands encore, De la plage lointaine oĂč tu dors Ă jamais, Comme un mĂ©lancolique et doux reflet dâaurore Au fond dâun cĆur obscur et glacĂ© dĂ©sormais ! Les ans nâont pas pesĂ© sur ta grĂące immortelle, La tombe bienheureuse a sauvĂ© ta beautĂ© Il te revoit, avec tes yeux divins, et telle Que tu lui souriais en un monde enchantĂ© ! Mais quand il sâen ira dans le muet mystĂšre OĂč tout ce qui vĂ©cut demeure enseveli, Qui saura que ton Ăąme a fleuri sur la terre, Ă doux rĂȘve, promis Ă lâinfaillible oubli ? Et vous, joyeux soleils des naĂŻves annĂ©es, Vous, Ă©clatantes nuits de lâinfini bĂ©ant, Qui versiez votre gloire aux mers illuminĂ©es, Lâesprit qui vous songea vous entraĂźne au nĂ©ant. Ah ! tout cela, jeunesse, amour, joie et pensĂ©e, Chants de la mer et des forĂȘts, souffles du ciel Emportant Ă plein vol lâEspĂ©rance insensĂ©e, Quâest-ce que tout cela, qui nâest pas Ă©ternel ? Soit ! la poussiĂšre humaine, en proie au temps rapide, Ses voluptĂ©s, ses pleurs, ses combats, ses remords, Les Dieux quâelle a conçus et lâunivers stupide Ne valent pas la paix impassible des morts. PoĂšmes tragiques ______ LE PARFUM IMPĂRISSABLE Quand la fleur du soleil, la rose de Lahor, De son Ăąme odorante a rempli goutte Ă goutte La fiole dâargile ou de cristal ou dâor, Sur le sable qui brĂ»le on peut rĂ©pandre toute. Les fleuves et la mer inonderaient en vain Ce sanctuaire Ă©troit qui la tint enfermĂ©e Il garde en se brisant son arome divin, Et sa poussiĂšre heureuse en reste parfumĂ©e. Puisque par la blessure ouverte de mon cĆur Tu tâĂ©coules de mĂȘme, ĂŽ cĂ©leste liqueur, Inexprimable amour, qui mâenflammais pour elle ! Quâil lui soit pardonnĂ©, que mon mal soit bĂ©ni ! Par delĂ lâheure humaine et le temps infini Mon cĆur est embaumĂ© dâune odeur immortelle ! PoĂšmes tragiques ______ SACRA FAMES Lâimmense mer sommeille. Elle hausse et balance Ses houles oĂč le ciel met dâĂ©clatants Ăźlots. Une nuit dâor emplit dâun magique silence La merveilleuse horreur de lâespace et des flots. Les deux gouffres ne font quâun abĂźme sans borne De tristesse, de paix et dâĂ©blouissement, Sanctuaire et tombeau, dĂ©sert splendide et morne OĂč des millions dâyeux regardent fixement. Tels, le ciel magnifique et les eaux vĂ©nĂ©rables Dorment dans la lumiĂšre et dans la majestĂ©, Comme si la rumeur des vivants misĂ©rables Nâavait troublĂ© jamais leur rĂȘve illimitĂ©. Cependant, plein de faim dans sa peau flasque et rude, Le sinistre RĂŽdeur des steppes de la mer Vient, va, tourne, et, flairant au loin la solitude, Entre-bĂąille dâennui ses mĂąchoires de fer. Certes, il nâa souci de lâimmensitĂ© bleue, Des Trois Rois, du Triangle ou du long Scorpion Qui tord dans lâinfini sa flamboyante queue, Ni de lâOurse qui plonge au clair Septentrion. Il ne sait que la chair quâon broie et quâon dĂ©pĂšce, Et, toujours absorbĂ© dans son dĂ©sir sanglant, Au fond des masses dâeau lourdes dâune ombre Ă©paisse Il laisse errer son Ćil terne, impassible et lent. Tout est vide et muet. Rien qui nage ou qui flotte, Qui soit vivant ou mort, quâil puisse entendre ou voir. Il reste inerte, aveugle, et son grĂȘle pilote Se pose pour dormir sur son aileron noir. Va, monstre ! tu nâes pas autre que nous ne sommes, Plus hideux, plus fĂ©roce, ou plus dĂ©sespĂ©rĂ©. Console-toi ! demain tu mangeras des hommes, Demain par lâhomme aussi tu seras dĂ©vorĂ©. La Faim sacrĂ©e est un long meurtre lĂ©gitime Des profondeurs de lâombre aux cieux resplendissants, Et lâhomme et le requin, Ă©gorgeur ou victime, Devant ta face, ĂŽ Mort, sont tous deux innocents. PoĂšmes tragiques ____________
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